Il y a un an deux jours (mon accouchement à domicile)
Le choix de l’AAD
Aujourd’hui, si mes calculs sont justes, j’entame ma 34ème semaine de grossesse. Je lis sur des forums les premières discussions sur «Avez-vous préparé votre valise pour la maternité ? » et autres «Comment faites-vous garder les aînés ? », et comme depuis le début de ma grossesse, je ne me sens pas concernée par la plupart des interrogations des futures mères ayant le même terme que moi. Nous ne vivons pas vraiment la même aventure puisque cette fois j’ai décidé d’accoucher chez moi.
Chez certaines le choix d’accoucher à domicile peut être une évidence dès le premier enfant, pour d’autres ce sera la condition sine qua non pour avoir un autre enfant sereinement après une expérience douloureuse en milieu hospitalier. Pour mon mari et moi, l’AAD est devenu une évidence après un cheminement de réflexion et une motivation communs.
En 2007 j’ai accouché de notre fille dans une maternité parisienne. J’ai connu un accouchement rapide et je fais partie des 2% de femmes y ayant accouché sans avoir recours à la péridurale. Encore aujourd’hui je peux qualifier mon accouchement d’idéal : j’ai eu tout le soutien de mon mari, j’ai pu accoucher dans la position que je souhaitais et n’ai eu ni épisiotomie ni déchirure.
Motivations
Mon accouchement pourrait être brandi comme preuve que la physiologie en maternité peut être respectée et mon mari et moi en avons été totalement satisfaits pendant des mois, nous remémorant avec émotion ces moments… Et puis certaines questions ont fait surface : si tout s’était déroulé moins rapidement, aurions-nous eu une telle liberté ? Si mon mari ne m’avait pas aidée à me mettre dans la position qui me convenait, les sages-femmes l’auraient-elles fait ? Pourquoi une sage-femme a-t-elle tiré sur le cordon (pour faire sortir mon placenta) jusqu’à ce qu’il soit arraché et que je doive subir une révision utérine sous anesthésie générale ?
- Mon accouchement fut donc rapide : nous sommes arrivés à 16h ce jour-là et notre fille nous a rejoints un peu avant 17h30.
Sous monitoring en salle de pre-partum on m’a demandé de m’asseoir, ce que j’ai refusé pour conserver toute ma mobilité ; une gageure quand un câble d’un mètre vous relie à une grosse machine ! Les sages-femmes qui nous ont accueillis nous ont dit que «pour un premier, c’est un centimètre par heure, vous avez beaucoup de temps devant vous » et nous ont laissés seuls avec un jeune couple. La femme ressentait des contractions depuis minuit et souffrait, allongée sur le dos.
Quelque temps plus tard, mon mari est parti chercher une sage-femme, les contractions s’intensifiaient. J’étais dilatée à 4, celle-ci nous a ramenés en salle de pre-partum en nous rappelant que «pour un premier, c’est un centimètre par heure, vous avez beaucoup de temps devant vous » …
Lorsque, moins d’une heure après notre arrivée, mon mari est à nouveau allé chercher une sage-femme, il a dû la ramener en la tirant par la manche de sa blouse. Je n’étais pas là depuis assez longtemps pour avoir déjà besoin de ses services. Elle m’a demandé si j’avais envie de pousser, je lui ai répondu que j’avais la tête de ma fille entre les jambes. Alors elle m’a demandé si je pouvais marcher et monter les escaliers jusqu’à la salle d’accouchement et c’est mon mari qui a trouvé un fauteuil roulant. Elle me posait des questions auxquelles je ne pouvais pas répondre, je n’étais plus que douleur et contractions, mon mari répondait à ma place.
Ces moments qui nous faisaient sourire les jours et les semaines suivant l’accouchement nous sont apparus peu à peu sous un autre jour. Pourquoi ne nous avait-on pas écoutés ? Pourquoi le ressenti d’une future mère n’est-il pas crédible lorsqu’elle vit son premier accouchement ? Pourquoi ces instants qu’on voudrait tant vivre pleinement ont-ils dû être parasités par des refus, des insistances ?
- Quand nous sommes arrivés en salle d’accouchement, on m’a laissé me déshabiller seule et on m’a dit de m’allonger sur le dos. Dans cette position la douleur était décuplée. Dès la fin de la contraction qui me paralysait j’ai dit que je ne pouvais pas rester comme ça. Aux sages-femmes qui restaient immobiles mon mari a dit que je me sentais mieux sur le côté et m’a aidée à me mettre dans cette position. Sans lui, les sages-femmes m’auraient laissée sur le dos. Leur seul commentaire fut qu’il fallait alors que mon mari soutienne ma jambe car elles ne pourraient pas le faire.
Aujourd’hui je sais que sans mon mari, j’aurais dû accoucher dans une position imposée.
- Après quatre contractions ma fille est née, dans sa poche des eaux intacte. Ce fut un premier regard magique qui fut échangé entre mon mari et sa fille à travers la fine membrane avant qu’elle soit posée sur ma poitrine.
Une vingtaine de minutes plus tard je n’avais toujours pas de contractions, mon placenta n’était pas sorti. Je n’avais pas mal, je ne saignais pas, je voulais juste être avec mon mari et regarder ma fille.
La sage-femme m’appuyait régulièrement sur le ventre mais le temps passait et dans les protocoles hospitaliers, le placenta doit sortir dans la demi-heure. A un moment je l’ai sentie insister, appuyer et quelque chose a rompu en moi. Ce n’était pas douloureux, j’ai demandé si c’était le placenta.
Elle m’a répondu que non, elle était toute pâle et tenait dans la main une partie du cordon ombilical qu’elle avait arraché en tirant dessus. Le placenta ne sortirait plus tout seul, il y avait risque d’hémorragie, je suis partie au bloc opératoire.
Nous étions contents, l’intervention fut très courte, trente minutes après l’avoir quittée je retrouvais ma fille.
Mais là encore, le temps passant, j’ai voulu me renseigner sur cette pratique dont je n’avais jamais entendu parler avant de la vivre. La «traction contrôlée du cordon ombilical» est une pratique à risque qu’on conseille de ne jamais pratiquer, qui peut provoquer des hémorragies massives ou des inversions utérines. Cette sage-femme a mis ma vie en danger et je ne l’ai pas su ; à ce moment, j’avais confiance et pensais qu’elle faisait pour le mieux pour moi.
Rétrospectivement, j’ai eu peur et je m’en suis voulu d’avoir été si confiante. Je n’en veux pas au personnel soignant qui agit souvent par obligation ou par automatismes mais mon mari et moi avons décidé d’être à l’avenir les acteurs principaux de la naissance de nos enfants.
A bien y réfléchir, avec les trois années de recul que nous avons aujourd’hui, nous avons eu beaucoup de chance. «Notre» accouchement aurait pu être un cauchemar s’il avait été moins rapide, si mon mari n’avait pas été aussi sûr de lui et s’il n’avait pas fait écran aux « interférences » émises par les sages-femmes.
Dès lors que nous avons essayé d’avoir un autre enfant, nous avons pris la décision de ne plus avoir à compter sur la chance pour vivre un aussi bel accouchement.
Début de l’aventure
Après des années en région parisienne, mon travail m’a amenée en province. Ma petite famille et moi nous sommes donc déplacés de 600km vers le sud et le soleil. Sans l’avoir prévu, deux facteurs nous ont poussé vers le choix de l’AAD. Nous sommes arrivés dans une région où les sages-femmes libérales ne sont pas aussi rares que dans le reste du pays et où apparemment le centre hospitalier pratique facilement les césariennes, avec un taux supérieur au taux national qui est déjà lui-même bien élevé.
Je suis tombée enceinte en janvier et avant toute chose, craignant qu’elles soient très sollicitées, j’ai cherché sur le site de l’ANSFL (Association Nationale des Sages-femmes Libérales) les coordonnées des sages-femmes les plus proches de notre domicile. Il me semblait important d’être suivie par quelqu’un géographiquement proche puisque j’accouche vite… Et comme nous n’avons pas de voiture, il fallait que les visites mensuelles au cabinet ne devienne pas un parcours du combattant !
J’ai donc contacté une sage-femme, travaillant avec trois autres collègues dans un cabinet à une trentaine de kilomètres de notre ville. Un premier rendez-vous fut pris et comme à chaque fois depuis, mon mari, ma fille et moi nous y sommes rendus ensemble.
Au premier rendez-vous nous avons donc rencontré M. et G. Cette dernière venait de rejoindre le cabinet, choisissant le libéral après des années d’activité en centre hospitalier.
Notre fille sur les genoux, nous avons parlé plus d’une heure et demie. Elles nous ont demandé de leur raconter la première grossesse et le premier accouchement, puis nos motivations, puis l’histoire de cette nouvelle grossesse.
Mon mari et moi avons échangé un regard, cette grossesse toute récente -2 mois à peine- avait en effet déjà une histoire. .. J’ai fait mon test et eu confirmation de la grossesse durant février, quand les fils aînés de mon mari se trouvaient chez nous pour les vacances scolaires.
Le 15 février, à midi, nous leur avons annoncé la nouvelle. Une heure plus tard, un appel nous apprenait que leur mère venait de décéder.
Une nouvelle vie commençait alors qu’une autre s’achevait brutalement. Les premières semaines se passèrent dans le tourbillon de l’adaptation à cette nouvelle vie à cinq qui ne durerait que quelques mois avant que la famille ne s’agrandisse.
Elles ont ensuite pris la parole pour se présenter, expliquant qu’elles n’étaient pas assurées ; les tarifs d’assurance s’élèvent jusqu’à plusieurs dizaines de milliers d’euros par an, ce qui est rédhibitoire. Elle nous ont rappelé qu’il fallait garder à l’esprit que l’AAD restait un projet jusqu’au bout, que ce projet pouvait ne pas se réaliser car une pathologie pouvait se présenter jusqu’au jour de l’accouchement. Enfin, elles ont insisté sur le fait qu’une relation de confiance mutuelle était nécessaire pour que ce projet soit bâti sur des bases saines.
Pour cette rencontre, nous avons fait l’aller-retour en autocar. 40 minutes de trajet, l’obligation de passer la matinée dans cette ville peu fréquemment desservie… Mais cette contrainte ne nous a pas arrêtés, nous étions convaincus : nous avions été écoutés et entendus.
Nous avons eu jusqu’à ce jour une consultation par mois, à laquelle nous nous sommes toujours rendus à trois : mon mari, notre fille et moi-même. Je voyais en alternance M. ou G. pour que la connaissance et la relation de confiance se créée avec l’une comme l’autre. Il semblait important que notre fille nous accompagne pour qu’elle aussi connaisse la femme qui viendrait nous assister pour la naissance, pour qu’elle aussi soit en confiance… Et il semblait important que les sages-femmes acceptent sa présence. Il ne fallait pas qu’elle soit perçue comme une gêne pour elles puisqu’elle serait présente à notre domicile le jour J.
A trois mois j’ai passé ma première échographie. Dans cette ville de 60 000 habitants, seul un cabinet privé et l’hôpital pratiquent les échographies de grossesse. J’ai choisi le cabinet pour éviter d’éventuelles questions sur mon choix d’une sage-femme libérale exerçant à 30 kilomètres de chez moi. D’après le praticien ma grossesse avait débuté plus d’une semaine avant la date que j’estimais et je voyais tout de suite les risques de déclenchement qui se seraient annoncés si j’étais suivie en centre hospitalier.
Les consultations avec les sages-femmes quant à elles se déroulaient toujours dans une ambiance sereine ; la première question portait systématiquement sur comment je ressentais le déroulement de la grossesse, elles demandaient ensuite si toute la famille allait bien et concernant les actes de suivi médical elles demandaient toujours ma permission même s’il ne s’agissait que de prendre ma tension. Elles me prenaient donc la tension, écoutaient le cœur de bébé et mesuraient la hauteur utérine. A un mois de mon terme aujourd’hui je n’ai eu aucun toucher vaginal, les sages-femmes se basant sur la position du bébé et sur mon ressenti pour juger qu’il n’était pas nécessaire d’en faire.
J’ai passé ma deuxième échographie dans le même cabinet privé qu’auparavant. Il a demandé qui me suivait et un silence lourd a suivi ma réponse. Nous avons dû demandé quatre fois avant que l’échographiste ne daigne nous dire le sexe de notre bébé.
J’ai appris que j’avais un placenta bi-partita, sans plus de détails. Sur internet, peu d’informations, hormis qu’il existait un risque que le placenta se morcèle lors de la délivrance. A la consultation suivante ma sage-femme me rassurait, pour elle qui cherche à écarter tout risque, cette particularité n’avait rien de pathologique.
Nous avons commencé un suivi haptonomique avec M. et une préparation à l’accouchement plus «classique» avec G.
Avec l’haptonomie nous avons appris à nous mettre à l’écoute de notre bébé, à lui demandait d’interagir avec nous tout en acceptant qu’il ne le fasse pas systématiquement.
G. a détaillé le déroulement physiologique de l’accouchement et l’allaitement et elle nous a demandé de faire partager notre expérience avec les deux autres couples présents qui eux n’avaient pas encore d’enfant. Lors de la dernière séance, nous avons essayé l’écharpe de portage, aspect de la parentalité qui à ma connaissance n’est pas abordé en structure hospitalière…
Mon terme est dans un mois. Je verrai encore une fois G. et une fois M. qui viendront à domicile pour que je n’ai pas à déplacer mon gros ventre.
Je me suis offert le plaisir d’une dernière séance d’ostéopathie avant l’accouchement et l’ostéopathe -qui est aussi docteur en médecine- a montré quelques gestes à mon mari pour soulager les tensions qui pourraient encore survenir. Il a eu un grand sourire et nous a félicités quand nous lui avons dit notre projet d’AAD, confirmant que tous les médecins ne sont pas réfractaires à cette pratique.
Les derniers préparatifs sont en cours. J’ai eu la liste des choses nécessaires pour l’accouchement. Des gants de toilette, des serviettes, des draps qui «ne craignent rien», des bassines ou des saladiers, une petite lampe orientable… Et une ordonnance à faire rédiger par un médecin pour une bouteille d’oxygène en cas de détresse respiratoire, s’il faut effectuer un transfert vers l’hôpital.
Accoucher à domicile n’est pas «accoucher comme nos grands-mères», il existe un suivi professionnel et sérieux et des limites. Ces limites, il faut les accepter pour notre sécurité et celle de notre enfant mais nous sommes par ailleurs libérés d’un suivi impersonnel et protocolaire qui ne peut pas convenir à toutes les femmes.
L’AAD n’est pas qu’un accouchement chez soi, c’est une grossesse plus sereine avec un suivi plus humain et personnel.
Mon terme est dans un mois et l’AAD est toujours un projet.
L’accouchement
Il n’aura pas attendu un mois.
Les sages-femmes m’ont dit que je pouvais accoucher à la maison à partir du 27, que le bébé ne serait plus considéré comme prématuré.
Nous avons récupéré le lendemain la bouteille d’oxygène, les masques (un masque adulte, un masque pédiatrique) et les granules d’homéopathie. Je dis à mon mari que ça y est, l’accouchement me semble plus proche encore et que notre bébé peut arriver puisque les conditions de sécurité nécessaires sont remplies.
Le jour suivant, le 29, je m’octroie le luxe de passer une grande partie de la journée au lit. Nous sommes mercredi et toute la famille est à la maison. Ma fille fait une sieste avec moi, joue avec ses frères, son père l’emmène faire une promenade en vélo ; l’après-midi passe tranquillement.
En fin d’après-midi, je dis à mon mari que je ne me sens pas très bien, je suis un peu barbouillée…Je n’ai pas envie d’être malade.
A 19h00, on commence à émettre l’hypothèse d’un début de travail…Mais c’est trop tôt, je dois accoucher dans un mois !
Je retourne dans ma chambre et me retrouve peu après à quatre pattes sur mon lit ; plus de doute, c’est confirmé, ce sont des contractions. Mon mari commence à faire à manger aux enfants et appelle M. à 20h00 : «Bon, on dirait bien que le travail a commencé… On te rappelle si ça se précise ». Il fait des allers-retours entre la chambre et la cuisine et me dit que M. finit sa soupe et se met en route, elle sera là dans un peu plus d’une demie heure puisqu’elle s’attend comme nous à un accouchement rapide.
Je suis à genoux sur mon lit, j’ai posé dessus mon gros ballon de grossesse et je me redresse pour y poser les bras et la tête à chaque contraction. Je râle, j’espère ne pas crier pour ne pas effrayer les enfants alors j’essaye de faire des sons graves tant que les contractions ne sont pas trop douloureuses, en espérant que je continuerai automatiquement de le faire quand je ne gérerai plus rien du tout.
Un des garçons vient me voir, je crois qu’il me demande si ça fait mal. Je lui dis que les contractions sont douloureuses mais qu’entre chacune ça va et j’ajoute qu’il devrait retourner au salon parce que je risque d’être très abrupte avec lui s’il me parle quand j’ai mal. Il s’éclipse.
J’ai mal, je crie pour que mon mari vienne me rejoindre. Je trouve qu’il n’arrive pas assez vite, je crie à nouveau « c’est quand tu veuuuuux ! »
Enfin il arrive, il a servi à manger aux enfants. Il retire le drap housse de notre lit, installe à la place un rideau de douche acheté pour l’occasion et qui fera office d’alèse géante et met par-dessus un vieux drap housse, pour le confort. Je remonte sur le lit, et reprend ma position.
Mon mari remplace avantageusement le ballon de grossesse, je m’appuie sur lui.
Il est 20h20, il rappelle M. qui se trouve à 10 minutes de route. Je contracte et râle bruyamment alors qu’il raccroche. Nous sommes face à face, j’ai les bras sur ses épaules. Je dis que mon col a intérêt à être dilaté d’au moins quatre ou cinq parce que j’ai mal. Un peu plus tard, je demande à voix haute pourquoi ça doit faire si mal. Mon mari me répond par des mots d’encouragements.
Dans une contraction, je perds les eaux. Je regarde, le liquide est clair. Je n’ai pas perdu les eaux quand j’ai accouché de ma fille, c’est une nouveauté pour moi. J’ai les genoux posés dans de petites flaques mais je ne ressens pas le besoin de bouger.
Je me rappelle avoir lu sur des forums que les contractions sont plus douloureuses après que la poche des eaux soit rompue. Je m’attends à souffrir, je demande à mon mari de poser ses mains sur le bas de mon ventre pour faire descendre notre bébé.
La contraction arrive, je dis à mon bébé de descendre, qu’il travaille bien et qu’il peut le faire doucement. Je le sens descendre, je suis consciente de tout ce qui se passe et je sens son corps et mon corps travailler ensemble. Mon mari le sens lui aussi descendre sous ses mains. Une autre contraction arrive et nous sentons une fois de plus bébé descendre. Nous n’avons pas peur, tout se passe normalement, c’est une évidence.
A la contraction suivante je pose la main sur mon périnée pour «appeler » notre enfant, comme on l’a vu en haptonomie. Cette fois je sens mon bassin s’élargir, mon mari l’entend même craquer et le crâne de notre fils se pose dans la paume de ma main. A la fin de la contraction, je n’ai pas d’effet «yo-yo », le crâne ne remonte pas. Je caresse la petite tête qui est encore en moi, je demande à mon mari s’il veut la toucher mais je ne retire pas ma main… J’ai l’impression que les secondes s’écoulent très lentement, je n’ai pas mal. J’ai conscience de tout et je tâte même autour du petit crâne pour avoir une idée de la tension que subit mon périnée.
Une seconde contraction et notre fils sort complètement, ma main ralentit sa sortie et je le pose sur le matelas. Comme à la naissance de notre fille, je suis submergée par une vague d’amour envers mon mari et mon enfant.
Mon mari apporte une petite couverture chaude pour envelopper notre bébé couvert de vernix. Je le prends dans mes bras et regarde l’heure, il est 20h40. Il pleure un peu, à peine, se calme très vite.
Très terre à terre je demande à mon mari de prendre une photo (nous n’avons pas de photo de la naissance de ma fille, l’appareil était tombé en panne le jour même et j’en avais gardé une grande frustration). Il dépose des serviettes sur les lit pour cacher le sang.
Les enfants ont entendu les petits pleurs et rentrent dans la chambre. Ils sont impressionnés mais moins que je ne l’aurais cru, ils sont surtout très heureux.
Dix minutes plus tard, un peu avant 21h, M. arrive enfin. Comme à son habitude, et c’est ce qui nous plait chez elle, elle est calme et souriante.
Notre fils est toujours dans mes bras, enveloppé dans sa couverture. La sage-femme grimpe sur le lit à côté de moi et se tord pour atteindre le cordon ; il ne bat plus, elle montre à mon mari comment le clamper. Il coupe le cordon.
Les enfants vont et viennent entre la chambre et le salon, ils veulent rester discrets mais voir leur petit frère est trop tentant.
Le temps passe, notre bébé tout calme se repose et ne tête pas. M. réchauffe son pèse-bébé en tissu sur un radiateur avant de le mettre dedans, la balance indique 3k100. On ne le mesurera pas ce soir, il retourne dans mes bras.
A 21h30, M. me pose la question que j’appréhendais en me demandant si j’ai des contractions. Je n’en ai pas, ou à peine un tiraillement. Je ne veux pas revivre mon premier accouchement et être transférée dans une maternité alors que la naissance a été si parfaite. M. a un air grave mais elle comprend, nous en avions déjà parlé auparavant
Les enfants sortent pour ne pas assister à la délivrance. Notre fils est en peau à peau avec son père.
M. tâte mon ventre, me dit qu’elle fait ça pour voir si le placenta est décollé. Il l’est, il y n’a pas de raison qu’il ne sorte pas et elle me dit de pousser fort tandis qu’elle exerce une petite tension sur le cordon. Je pousse de toutes mes forces et de toute ma volonté et je sens le placenta sortir. Il est beaucoup plus petit que ce à quoi je m’attendais. Il est entier.
Il est 21h50. Mon placenta est sorti plus d’une heure après la naissance, en maternité le protocole est de ne pas attendre plus de 30 minutes avant de mener une délivrance artificielle.
M. inspecte mon périnée, quelques éraillures. Pour elle pas question de faire des points, soulagement pour moi qui ait gardé de mauvais souvenirs des quatre points inutiles faits sur l’éraillure de mon premier accouchement.
Je vais prendre un douche pendant que mon mari et M. font le lit. Je reviens dans ma chambre et je me couche toute propre dans mon lit tout propre. M. réchauffe une assiette de pâtes et me l’apporte.
Je suis sur un petit nuage de bien-être, de fierté et de confort.
Accoucher à domicile m’a permis de savoir enfin que je pouvais accoucher de A à Z et nous a permis de ne pas séparer la famille pendant quelques jours d’hospitalisation. J’ai connu grâce à ce projet devenu réalité l’accouchement parfait, selon mes critères.
Lazare est né chez lui le 29 septembre 2010. Avec un mois d’avance, il affichait un joli poids de 3kg100 et 52 cm.